TW: attention, ce texte parle de violence et de meurtres dans un contexte conjugale.

Les différentes formes de violence font partie de notre quotidien au Centre des femmes. Dans le cadre de notre travail, nous sensibilisons les différentes intervenant.es du milieu, siégeons sur des Tables de concertation, faisons des actions collectives, des représentations politiques. Mais, surtout, nous accompagnons celles qui vivent ces violences. Nous les écoutons, les soutenons, les croyons. TOUJOURS. Nous pratiquons l’intervention féministe. Qu’est-ce que cela signifie? Que c’est toujours la personne elle-même qui décide, pour elle, à son rythme, dans une démarche sans aucun jugement car nous comprenons les mécanismes utilisés par les agresseurs. Le cycle de la violence est toujours le même, peu importe la victime. C’est à croire que leurs agresseurs se sont tous parlé un matin pour utiliser les mêmes tactiques de manipulation: dénigrement, contrôle, isolement, menaces de suicide, insultes, culpabilisation de la victime, peur, etc. Parce que « fuck », ça marche! L’emprise de la violence conjugale peut être totale et prend toute la place dans la vie de la victime. Contrairement aux autres formes de violences criminelles, la violence conjugale a de particulier que la victime habite avec l’agresseur et qu’il y a un lien intime entre les deux, ce qui rend l’intervention très complexe.

Bref, l’intervenante en moi se questionne. Notre approche est-elle la bonne? Je me demande si, dans une autre situation, on « attendrait » que la victime soit prête. Je me demande si on laisserait faire en toute impunité un homme que nous savons violent dans un autre contexte que conjugal. Je sais que vous allez me répondre oui… et c’est ce qui arrive. Mais je me demande si nous sommes trop « douces » dans nos interventions. Je pèse mes mots car mon objectif n’est pas d’infantiliser. Et n’est-ce pas banaliser un peu ces violences que d’attendre? Attendre le pire? Pour constater les conséquences des violences qui restent pour la Vie. Toutes les situations de violence conjugale sont aussi pires, sont aussi graves les unes que les autres. Je n’ai pas la solution, je sais que nous ne pouvons pas forcer personne à quitter. Mais je ne vous cache pas que chaque situation de violence conjugale que je vois passer au Centre, je dois vivre avec l’idée qu’elles pourraient être tuées. Et c’est insupportable. Je désire vous entendre sur le sujet, collègues féministes.

Si vous avez besoin de parler, de conseil ou de soutien, contactez SOS Violence conjugale 24/7

1-800-363-9010

Crédits Illustration de bannière : Binette
Crédits photo : Shown Morin

Une réponse

  1. Julie Blackburn, elle dit :

    Le questionnement est tellement juste !
    Je crois que cela relève du système sexiste dans lequel on évolue ET de la manipulation sournoise qui s’installe dans la relation.
    Comme l’intervention féministe en contexte de violence conjugale n’est pas reconnu au niveau gouvernemental, le système n’agira pas officiellement. Nous devons continuer à travailler à sensibiliser et à conscientiser tout le monde pour une pleine reconnaissance du problème systémique. Par la suite, nous pourrons mieux encadrer les interventions de préventions à la violence. Même dans notre système scolaire, les interventions ne sont pas définies en contexte de violence (autre que de l’intimidation et même là, l’intimidation a le dos large).
    Je terminerai mon commentaire en affirmant que quand on sait que le profil des hommes au pouvoir est sensiblement le même qu’un pervers narcissique et que ce mode de manipulation sert à étendre l’éternel néocapitalisme, on est pas sortie du bois ! En toute sororité. Féminicides, encore une de trop.

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