• Trigger warning: ce texte comporte des descriptions explicites de violence conjugale

Je suis la conjointe de M. Violence. Au début de notre relation, je croyais qu’ il me rendrait heureuse, mais tout est devenu un enfer. Lorsque je l’ai rencontré, il était gentil, impossible de connaître sa vraie nature, car tel un caméléon, il était expert de l’usurpation. Tout comme un animal traquant sa proie, il a commencé à resserrer son étau, il a mis en place ses techniques pour m’ isoler afin d’augmenter son emprise. Il avait toujours des prétextes pour éviter d’aller voir nos amis et moi, je le croyais. Par la suite, ce fut le début d’un cauchemar sans fin.

De sa bouche, il s’est mis à déferler un torrent d’accusations de paroles blessantes le tout en criant, en bourrassant, mais il suffisait un jour de gentillesse pour que je lui pardonne et que l’espoir revienne, c’est ce qu’on appelle la lune de miel. En présence d’autres personnes, il était gentil. C’était pour sauver les apparences. Chaque jour, c’était marcher sur des œufs, m’ effacer de peur de déclencher une tempête. De son côté, M. Violence était sur son trône et ne faisait nul effort pour changer, je faisais tout pour avoir une atmosphère calme, car je ne voulais pas que mes enfants chéris soient témoins de tout cela et en soient traumatisés. Que de nuits d’insomnie à croire que la tempête se déchaînerait. Je travaillais, je faisais tout le travail à la maison, car lui ne faisait pas grand chose. J’étais épuisée, je me sentais comme un arbre ballotté par les bourrasques de vent. Je me disais que les enfants ont besoin d’un papa et d’une maman sous le même toit et j’avais espoir qu’un jour il comprenne tout le mal qu’il faisait. Puis, les enfants ont grandi et quitté le nid et là il se déchaîna. C’est par la suite que M. Violence verbale ajouta à son diadème la pierre de la violence physique. Demander secours était impossible lorsque l’on se fait déconnecter des téléphones et bloquer la porte. Lorsque je réussissais à retrouver un peu de calme, il remettait les téléphones en fonction, mais il me surveillait.

Sans crier gare, à trois reprises, il m’a plaquée au mur en mettant ses mains autour de ma gorge. La troisième fois,  j’étais tellement tannée de vivre cette violence que je lui ai dit : «Vas-y, serre, tue-moi qu’on en finisse une fois pour toute». Surpris de ma réaction, il relâcha son étreinte et j’ai réussi à appeler la police. J’étais appuyée dans le coin d’un mur, les bras en croix, pleurant, me demandant s’il aurait le temps de me tuer avant  l’arrivée des policiers. Soudain, j’entendis des voix, enfin, ils étaient là. J’étais pétrifiée, incapable de bouger, de parler, la policière disait mon nom, mais j’étais incapable de lui répondre. Elle me trouva  et avec gentillesse m’emmena dans ma chambre, elle me parla de façon rassurante et empathique, mais je ne sais pourquoi elle a dû quitter et c’est à ce moment que je me suis retrouvée au banc des accusés. Un policier vint me demander de lui montrer mes poignets, je lui ai demandé pourquoi. Il me répondit : «Votre mari a dit que vous avez eu des idées suicidaires toute la journée et que c’est pour cela qu’il a dû vous maîtriser, alors vous me montrez vos poignets et vous faites votre valise, on vous amène à l’hôpital.» J’étais stupéfaite, mais qu’est ce qui se passait. Habituée à être docile, j’ai commencé à faire ma valise, puis j’ai entendu les policiers rigoler et jaser avec mon époux. Indignée, je suis allée les voir et en pointant mon mari, j’ai dit : «Toé, t’arrête de mentir, ce que tu leur as dit est faux, c’est toi qui a voulu m’étrangler, je n’ai jamais eu d’idées suicidaires.» À ce moment, un policier m’a dit: «Mme, en faisant cela, vous n’arrangez pas les choses.» Je lui ai répondu : «C’est moi la victime et vous le croyez lui, il n’est pas question que j’aille à l’hôpital.» Par la suite, je suis retournée dans ma chambre. Presque aussitôt, un policier est revenu à la charge en m’ordonnant de faire ma valise, je lui ai redit non. Alors, il m’a dit: « Ok, on va faire venir une travailleuse sociale pour vous évaluer.» Je n’en revenais pas, on avait voulu m’étrangler, etc. et c’est moi qui devais être évaluée.  Une TS est venue et a conclu que je n’avais aucune idée suicidaire. Le policier revint, il voulait que j’aille passer la nuit ailleurs,  je lui ai dit que non, c’était à lui de partir et c’ est ce qu’il fit. Le lendemain, mon bourreau est revenu en pleurs, s’excusant. J’ai accepté qu’ il revienne, mais j’ y ai mis des conditions, qu’il suive une thérapie pour homme violent, etc. et il a accepté. Pendant quelques semaines, aucune violence, puis l’enfer a recommencé et j’ai appris qu’il ne s’était jamais inscrit pour suivre une thérapie. À la suite de la visite des policiers, les violences physiques ont cessé.  La violence verbale augmenta. Je me demande souvent pourquoi je demeure dans cette relation. Serait-ce en raison des souvenirs puissants de petits moments de bonheur avec lui ou de ce petit brin d’espoir qu’ il s’améliore, je n’en sais rien.

Des femmes sont aux barricades pour faire entendre nos voix.  Le système judiciaire devrait changer. Les policiers devraient être mieux formés pour intervenir. Pourquoi ne pas aider davantage les organismes qui nous aident?  Nous faisons face à un énorme système qui est lent à agir ne comprenant pas l‘urgence d’agir. Il faut continuer à se battre pour améliorer les choses.

  Un gros merci aux intervenantes du Centre des Femmes du HSF La Passerelle et de La Méridienne  pour votre aide, votre belle écoute, votre empathie, votre disponibilité, etc. Vous êtes précieuses pour moi. En résumé, merci à toutes celles qui ont été et sont encore là pour moi.

Femme de Monsieur V

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